Internet : un gadget pour les entreprises françaises ?
2012 se profile déjà et c'est l'heure des bilans. La France est à la traîne sur Internet et cela, loin d'être glorieux, fait la part belle au conformisme culturel français qui a du mal à franchir le pas. Comment et pourquoi l'appropriation d'Internet coince-t-elle autant dans les entreprises françaises ?
Chiffres et bilan sur le retard numérique des entreprises françaises
Seulement 43% des entreprises françaises sont présentes sur la toile :c'est le constat dressé par l'étude parue en décembre 2011 de la société belge Email-Brokers, spécialisée dans la gestion des bases de données. Elle est sans appel en termes de présence sur le Net : la France ne se classe qu'au neuvième rang européen !
Une très grande partie de l'Internet français (71%) est constituée de sites "vitrines", c'est-à-dire destinés principalement à présenter l'activité d'une entreprise.
À l'aube de 2012, le site vitrine apparaît comme statique et relativement basique. À l'aune du web social où interactions et conversations se distinguent sur la toile, on attend un minimum de valeur ajoutée d'un site Internet d'entreprise. En effet, ce modèle ne répond plus aux attentes des internautes et n'offre aucun de ces outils devenus incontournables aujourd'hui (vidéo, blogs, réseaux sociaux, wikis, serious games....).
Il ne s'agit pas seulement d'être présent en ligne pour montrer qu'on existe, mais aussi d'optimiser de façon efficace son image de marque au travers de fonctionnalités spécifiques.
Dans leur immense majorité, les sites web français sont peu actualisés (73% des sites n’ont pas été mis à jour depuis plus d’un an) et sont qualifiés de non-conformes à la législation en vigueur (23% des sites sont illégaux, faute d'afficher les mentions légales obligatoires et c'est même le cas de 71% des sites publics !
"Internet est encore largement considéré comme un gadget en France, et non comme un partenaire économique", résume William Vande Wiele, fondateur et PDG d'Email-Brokers.
Et pour finir de s'en convaincre, le retard sur l'internet mobile prolonge encore la fracture numérique des entreprises françaises.
Près de 19 millions de mobinautes en France, selon un communiqué du 15 novembre 2011 de Médiamétrie. L’internet mobile se développe à vitesse grand V et affiche un taux de pénétration de 27% en France.
En 2011, 14 millions de Français utilisent un smartphone pour surfer sur internet. Et les mobinautes Français se placent même en tête des usages.
Alors qu'en face, 12% à peine des entreprises françaises ont développé un site mobile ou une application mobile.
Ainsi, Internet ne compte que pour 3,7% du PIB alors que 320 000 emplois pourraient être créés dans ce secteur en France en période de rigueur économique gouvernementale, toujours selon l'étude d'Email-Brokers.
Un point positif toutefois, le commerce en ligne en France connaît une progression presque insolente en temps de crise.
Le nombre de sites e-commerce est en progression: 20.000 ont été créés ces 12 derniers mois pour atteindre un record de 93.300 sites. La barre symbolique des 100.000 sites devrait être franchie en 2012, explique encore Marc Lolivier de la FEVAD qui rappelle qu'"il se crée un site marchand toutes les demi-heures".
Pour l'ensemble de l'année, l'e-commerce en France devrait dépasser 37 milliards d'euros, contre 31 en 2010, anticipe la FEVAD.
Pourquoi si peu d'entreprises sont présentes sur Internet ?
Pour la plupart d'entre elles, créer un site internet passe au second plan de leur communication alors même qu'aujourd’hui disposer d’un site Internet est devenu un atout majeur et un moteur de croissance incontournable.
- Absence de volonté politique
- Une forte méconnaissance des techniques et outils utilisés sur Internet
- Absence de temps et de budget nécessaire pour concrétiser
C'est la principale explication avancée par l'étude de la société belge Email-Brokers.
Il faut reconnaître qu'une partie importante de la classe politique française ne maîtrise pas le média et ses enjeux. Cette méconnaissance d'Internet et des phénomènes qui agitent la toile tels les réseaux sociaux ne favorisent pas l'esprit d'ouverture.
Cette méfiance peut aussi s'expliquer par le fait que pour beaucoup de responsables politiques, l'information représente le pouoir. Or, Internet propose une alternative diamétralement différente : la diffusion immédiate de l'information à grande échelle.
Ainsi, qu'ils s'agissent d'hommes politiques ou de dirigeants d'entreprises, ils doivent faire face à un nouveau phénomène d'envergure : la perte de "contrôle" des canaux de diffusion de l'information.
La culture numérique introduit de nouvelles valeurs et de nouveaux usages que les dirigeants d'entreprises ne maîtrisent pas forcément. Et comme souvent en France, l'inconnu fait peur et la peur paralyse entraînant un désintérêt inavouable plutôt qu'une appropriation cohérente et effective.
Ceux, qui comme moi, sont tombés dedans très tôt -à savoir, en 1998 dans mon cas-, évoluer en parallèle des évolutions du média fut aussi passionnant que gratifiant.
Seulement, les dirigeants d'entreprise craignent non seulement l'usage des informations diffusées sur le média par la concurrence que de ne plus pouvoir contrôler leur image et leur e-réputation.
Elles sont bien trop nombreuses les entreprises qui négligent Internet pour de mauvaises raisons. Certes, l'investissement en temps et en argent pour développer sa visibilité sur le web n'est pas négligeable.
Sans omettre les discours complexes et parfois obscurs tenus par certains professionnels locaux en la matière. Pas de quoi rassurer les patrons indécis !
Rappelons que la France se situe encore au 20e rang mondial en termes de ratio numérique/PIB. Il y a donc encore énormément d'efforts à accomplir.
Un plan d'action pour favoriser l'appropriation des TIC dans les entreprises
Les entreprises qui adoptent les TIC sont plus compétitives que les autres. Pour accélérer la diffusion des TIC, notamment dans les TPE et PME, plusieurs dispositions vont permettre aux entreprises du pays d'adopter les outils numériques.
Le programme TIC et PME 2015: développez les échanges entre entreprises grâce au numérique.
Lancé en mars 2010, le programme vise à accélérer l’utilisation des nouvelles technologies dans les PME. Il favorise les démarches de coopération entre entreprises et la structuration des filières. Dans un contexte économique fragile, les technologies de l’information et de la communication (TIC) constituent plus que jamais un levier majeur d’innovation et de croissance : porteuses de transformation à la fois des systèmes de management et des processus de l’entreprise, elles permettent d’améliorer sa réactivité et sa performance. Dans certains cas, elles sont aussi nécessaires : pour éviter de se faire dé-référencer par certains clients, ou pour répondre à une réglementation.
Le ministre chargé de l’Économie numérique auprès de la ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie a choisi 10 projets exemplaires pour faire du numérique un levier de compétitivité et de structuration des filières.
Plan France numérique 2012-2020: Le Ministre en charge de l’Économie numérique a présenté le bilan du premier volet du Plan France Numérique le 30 novembre 2011 et a annoncé les axes pour les huit prochaines années. Sans financement...
Sur les 151 mesures présentées en 2008, de nombreux objectifs n'ont pas été atteints. Reste que le ministre affiche une haute satisfaction du travail accompli.
Et à quelques mois des élections présidentielles, il n'hésite donc pas à présenter les grands axes de développement pour les prochaines années avec 57 objectifs identifiés.
Surtout, il s'agit de mener à bien ces réformes "sans accroître les dépenses de l’État".
Traduction, les mesures présentées n'ont pas été financièrement évaluées et se feront sans budget supplémentaire. On peut alors s'interroger sur la possibilité de les mettre en œuvre.
Le Ministre a également réaffirmé que le numérique est source de créations d'emploi et qu'il est par conséquent nécessaire que le développement de ce secteur soit une priorité pour le gouvernement français.
Conclusion : Vers la fin de l'exception française ?
L'obsession du changement en l'absence de culture numérique finit par devenir suffisamment nocive pour paralyser les dirigeants d'entreprises qui, fautes de maîtriser les techniques et d'avoir les ressources financières nécessaires, abandonnent tout simplement le média.
Alors même que la crise perdure depuis 3 ans et que face à la concurrence de plus en plus féroce des pays émergents comme la Chine, plus aucune entreprise française ne peut se permettre de négliger le vecteur de communication, de promotion et de vente qu'est Internet (CA de 9 à 600% supérieur pour une entreprise avec un site), s'il s'inscrit sur le long terme tout en respectant une stratégie adaptée aux objectifs préalablement définis.
En plus, les clients adoptent beaucoup plus vite les nouvelles technologies (nouvelles façons de consommer, de rechercher de l'information, de communiquer) que les entreprises. Ils sont déjà sur Internet et se connectent au moins une fois par jour.
Tout comme le web continue d'évoluer, le site doit lui aussi devenir agile et continuer de s'adapter.
Le hasard n'a pas sa place dans la quête de leader international, si la France voulait seulement se donner les moyens de ses ambitions.
Et, si vous avez une question ou besoin d'un conseil, n'hésitez pas à me contacter.
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