Les réseaux sociaux et le scepticisme des Français

Outil de diffusion, d'échange et de recueil d'avis, la communication interactive est l’essence même de tout réseau social. Comment les individus et les entreprises en France se sont-ils appropriés ces réseaux modélisant le lien social numérique et les échanges d'opinions ?

Selon le second baromètre de la confiance des Français dans le numérique -réalisé par l'Idate pour l'Association de l'économie numérique (Acsel) et la Caisse des Dépôts et publié le 20 octobre 2011-, 85 % des Français sont inscrits sur des réseaux sociaux, mais seuls 35 % ont confiance en ces derniers.


reseaux sociaux

Les individus redoutent le non-respect de leur vie privée

Toujours selon le baromètre précité: 48 % des internautes citent comme risque majeur l'accès à leur vie privée par des inconnus sur les réseaux sociaux, et 33 % un tel accès par l'entourage professionnel. Des préoccupations qui arrivent loin devant la diffusion de virus (21 %) ou la perte de données enregistrées (5 %).

Internet est un média attrayant qui désinhibe la communication entre individus, celle-ci ayant lieu par le biais d'un écran derrière lequel il est aisé pour l'individu de se croire intouchable et à l'abri. C'est aussi un espace de diffusion où vie privée et vie publique se mélangent et où il est parfois difficile de faire la distinction entre les deux.

Une proportion importante d'internautes est préoccupée par le manque de confidentialité en ligne imputé aux réseaux sociaux (27%) alors que 38% déclarent que "rien ne peut leur donner confiance". Les attitudes envers la vie privée sont très liées à la tranche d'âge de l'individu, particulièrement les plus âgées contrairement aux adolescents qui ne sont pas du tout dérangé par le fait de dévoiler leur vie privée et intime en ligne.

Pour Josh Freed, éditorialiste canadien, c’est la plus importante fracture générationnelle depuis des décennies, qu’il évoque ainsi : d’un côté, nous avons la "génération des parents", de l’autre, la "génération des transparents" ; la première passant son temps à protéger sa vie personnelle quand la seconde ne semble pas en avoir. Du coup les « transparents » ne perçoivent pas les risques éventuels d’une société de surveillance à laquelle ils ont été conditionnés très tôt, alors que leurs parents ressentent ce danger pour eux-mêmes.

Cependant, ce n’est pas vrai pour tous les jeunes. Mark Zuckerberg, fondateur et PDG de Facebook, décrète que si les paramètres de confidentialité du site ont changé, ce serait parce que les internautes n’ont plus de "scrupule à partager toutes sortes d’informations, plus ouvertement et avec plus de monde que dans le passé". Ses propos se basent sur un phénomène en vogue concernant la publication de sa vie privée sur le web sans penser aux conséquences, pas plus aux implications pour le futur. Cela lui sert certainement à justifier sa politique en matière de protection de la vie privée vivement critiquable, il n’empêche que les jeunes générations semblent avoir une notion fort différente de ce qu’est la vie privée, et de la manière dont elle doit être protégée.

Les dérives des réseaux sociaux

De plus en plus, Facebook s’impose aujourd’hui comme la référence mondiale et conserve sa place de réseau social le plus connu en France avec plus de 23 millions de comptes au 15 novembre 2011 selon socialbakers.

Selon l'Observatoire Ifop des réseaux sociaux du 15 novembre 2011, Facebook domine à nouveau le classement avec 95% des internautes interrogés et devance toujours YouTube (92%). Bénéficiant d'une hausse importante depuis deux ans, Twitter prend la troisième place du podium (85%) au détriment de Copains d'Avant (82%).

Seul site bénéficiant d’un taux d’appartenance en forte hausse sur un an, Facebook est pour la première fois le réseau social le plus fréquenté par les internautes français (49%).


Facebook VS Google

À plusieurs reprises, Facebook a revu les termes d'utilisation de son service sans tenir compte des implications pour les internautes déjà inscrits. D'où un fort mécontentement de la part des membres qui subissent "piégés" ces évolutions de conditions du site sans toujours savoir ce que cela entraîne comme conséquence lors de son utilisation.

Et qu’en est-il de ces dérives constantes que l’on retrouve sur les réseaux sociaux et tout particulièrement sur Facebook ?

À l'image de notre société, Facebook n'est qu'un miroir réfléchissant d'une réalité bien moins flatteuse. L'amplification de faits mineurs au travers de la malveillance de certains qui transforment le quotidien de ceux qui en sont les victimes en moquerie, intimidation, voire humiliation.

Qu'il s'agisse d'addiction virtuelle -avec leurs Iphones/smartphones, les jeunes peuvent se connecter de partout et tout le temps à Facebook et Twitter, à en devenir complètement addictifs-, du spam social –à savoir, recevoir en permanence des invitations d'inconnus dont l'ampleur est parfois telle que les inscrits sont littéralement pollués et complètement dépassés- ou des cyber-prédateurs, notamment sexuels, l'ensemble des internautes inscrits sur ses réseaux y sont quotidiennement soumis bien malgré eux. Et la tendance continue à s'étendre au point de créer de véritables névroses auprès des jeunes et des moins jeunes aussi.

Et ce ne sont pas forcément les "transparents" qui en sont les auteurs.

Les entreprises craignent pour la confidentialité et leur e-réputation

Les craintes des entreprises demeurent un frein indéniable à l'utilisation des réseaux sociaux. Parmi les réticences relevées, deux occupent une place prépondérante : les atteintes à la confidentialité et les risques en matière de sécurité.

Toutefois, les entreprises ne peuvent ignorer cette nouvelle réalité sociale. Les médias sociaux sont un formidable terrain d’expression et d’échange pour les marques souhaitant entrer en contact avec leurs clients et prospects dans le but de développer des interactions sociales de proximité et d’améliorer leur offre.

Mais le manque de connaissance de la culture 2.0 reste un important frein à l'intégration des réseaux sociaux et explique pourquoi tant d'entreprises encore continuent à les délaisser alors même que les salariés les fréquentent au moins une fois par jour.

Certains patrons dénoncent aussi la perte de productivité des collaborateurs que représente l’utilisation des réseaux sociaux au sein de l'entreprise.

Les entreprises craignent, en outre, un autre coût non négligeable, celui de la divulgation d’informations confidentielles appartenant à l’entreprise ou la diffusion par les salariés de messages, photos ou vidéos ternissant leur image.
La multiplication des usages inappropriés ou d'emplois inadéquats d'outils peut devenir source d'échecs répétés et finalement de rejet.

Une étude publiée par Symantec en 2011 dévoile que les réseaux sociaux ont coûté 4 millions de dollars aux grandes entreprises : une perte significative qui se répercute inéluctablement sur le chiffre d’affaires ; une perte liée à la divulgation d’informations confidentielles qui (selon 94% des entreprises interrogées dans cette étude) aurait nuit à l’image de marque des entreprises et aurait émoussé la confiance des clients.

Les entreprises pourraient dès lors se détourner des outils sociaux, renonçant de fait à l'importante création de valeur qui peut en être issue.

Une inévitable désillusion face aux promesses non tenues

La promesse inhérente aux réseaux sociaux est plus d'ouverture vers l'extérieur, donc pour les internautes un accès plus directe à l'univers de la marque au travers de conversations directes, de plus de transparence et d'un meilleur ciblage de leur offre, mais surtout l'amélioration de la qualité du service.

Les entreprises doivent gagner en réactivité et en agilité, aussi bien dans l’adaptation et optimisation continuelles des démarches qu’elles mettent en place, que dans l’organisation.

Or, la réalité est encore trop peu souvent à la hauteur des promesses entrainant une inévitable désillusion et la défection des internautes français.

Il reste donc pour la marque à définir des objectifs plus réalistes et à surtout mettre en place une feuille de route précise pour structurer sa présence sur les médias sociaux et s'y installer de façon durable. En résumé : moins de buzz et plus de conversations.

En conclusion

Des progrès restent à accomplir dans la fiabilité des réseaux sociaux et dans la perception qu'en ont les internautes français. Ils restent prudents et le contrôle de l'identité numérique représente une priorité pour 44% d'entre eux, qui évitent de publier des informations privées sur le web ou en limitent l'accès(1).

Évidemment, si l'on comprend l'intérêt d'utiliser ce type d'outils, on imagine encore plus facilement les risques et dangers qu'ils présentent tant pour l'individu que pour l'entreprise.
La réponse ne serait-elle pas plutôt dans l’utilisation professionnelle des nouveaux moyens de communication que sont les réseaux sociaux et qui permettent à toute entreprise de concilier la maîtrise de sa communication et le respect de ses devoirs.

La vigilance reste le maître mot dans les usages liés aux réseaux sociaux et faire preuve de discernement et d'intelligence ne constituent pas une idée de vieux con(2).

Et, si vous avez une question ou besoin d'un conseil, n'hésitez pas à me contacter.


1) Selon un Sondage LH2-ZDNet.fr réalisé en février 2011
2) Jean-Marc Manach dans cet article d'InternetActu.net au titre provocateur : La vie privée, un « problème de vieux cons » ? Il dresse un parallèle entre la façon désinhibée qu'ont les jeunes internautes de se dévoiler sur le Net et la révolution sexuelle, et se demande si ceux qui sont gênés par cette façon décomplexée de s'exprimer ne seraient pas un peu coincés.

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