L’information sur Internet, un produit comme les autres ?

La prolifération des sources et outils remet en question la valeur de l'information sur un réseau où chacun peut créer son propre contenu et dénicher lui-même les informations qui l'intéressent. Mais alors, l'information a-t-elle encore une valeur sur un réseau submergé d'informations ? Et quelle valeur a-t-elle pour les entreprises qui sont elles-mêmes productrices d'information ?

La gestion de l'information préoccupe depuis toujours les entreprises et l'envolée d'Internet a eu plusieurs effets sur leur compétitivité qui dépend de leur capacité à maîtriser l'information sur le réseau.

1. L'infobésite du web met l'information en péril

L'expression "trop d'informations tue l'information" est particulièrement adaptée à la toile.

  • Surabondance et redondance
  • Plétores d'informations circulent librement sur Internet et rien n'est figé sur la toile qui croît chaque minute davantage.

    Or, les entreprises se doivent de suivre les moindres soubresauts du marché, de la société, de la réglementation tout comme de la concurrence. Elles doivent se tenir informer pour anticiper, se développer et rester compétitives.
    Mieux les décideurs sont informés, plus grande est leur marge de manœuvre et réduisent leur incertitude liée aux fluctuations environnementales (concurrentielles, sectorielles, politiques, sociales, juridiques et réglementaires).

    La surabondance d'information est devenue la norme sur Internet. Cependant, la quantité de données déferlante est telle qu'il devient indispensable de maîtriser la navigation dans cette mer d'informations.

    L'afflux d'informations crée une pauvreté de l'attention. Or, pour comprendre véritablement un sujet, les remises à jour régulières ne servent à rien. Seule une analyse soignée et réfléchie de l'information permet une réelle compréhension.

    L’abondance de l’information génère également un phénomène de redondance, particulièrement incontestable sur la toile : une même information peut être sur le site officiel d’un journal, commentée sur le site d’un bloggeur et relayée sur un réseau social.

    Néanmoins, cette redondance de l'information n'est pas exhaustive et souffre d'une absence dangereuse de filtrage qui concourt à une diffusion croissante d'erreurs, de fausses nouvelles. .
    Enfin, l'information est diluée, "polluée" par des faits insignifiants.

    De plus, l'information est de plus en plus éphémère sur Internet puisqu'une information chasse l'autre instantanément et son traitement est de moins en moins durable et complet.

  • Fiabilité et pertinence

Face à cette abondance d'information, l'entreprise peut tout de même être mieux informé à condition de faire preuve d'esprit critique, c'est-à-dire de procéder à une sélection pertinente et de choisir des sources fiables.

Davantage d'information signifie aussi davantage de confusion. La prollifération de sources d'informations n'est pas en soi un problème. C'est l'usage que chacun en fait dans l'entreprise qui en est un.


information pertinente

Internet est rempli d'informations qui s'ajoutent et sont mises à jour continuellement. Ces informations existent sous de nombreuses formes (faits, opinions, histoires, interprétations, statistiques) et vise des objectifs variés (informer, persuader, vendre, présenter un point de vue, créer ou changer une attitude ou une croyance). Pour chacun de ces différents types d'information et d'objectifs, la qualité et la fiabilité de l'information présentée varient de très bonnes à très mauvaises, avec toutes les nuances comprises entre ces deux extrêmes.
Le futile côtoie le dramatique, l'absurde se relaye comme l'insignifiant, la rumeur se propage bien plus vite que l'actualité qui, au demeurant, possède de multiples vitrines hors du milieu de la presse.
Témoins, médiateurs, experts, amateurs, journalistes, rédacteurs de tous horizons relatent, rapportent, commentent et analysent indubitablement.
Informer, c'est communiquer, échanger et tout le monde peut devenir producteur de contenu sur Internet.

Avec le web 2.0 sont apparues de nouvelles valeurs (la visibilité, la popularité), de nouvelles pratiques collaboratives d’évaluation, de nouveaux outils de filtrage collaboratif, etc., mais aussi de nouveaux types d’infopollutions, de nouvelles dérives informationnelles, de nouveaux "mésusages" de l’information. Bref, beaucoup de nouveautés, qui semblent transformer radicalement la problématique de l’évaluation de l’information.

2. La valeur de l'information: pouvoir et partage

Sans maitrise, la puissance de l'information n'est rien dans l'entreprise. Elle est indispensable à son enrichissement et doit être adaptée au besoin spécifique tout en remplissant les critères inhérents.
Ce qui en fait un produit outil de l'entreprise, un capital, un facteur d'échanges et innovations: il faut donc en déduire une valeur.

La multiplicité des sources permet une pluralité des points de vue, mais aussi une diffusion de plus en plus rapide de l'information grâce à la libre-circulation sur le réseau et aux outils adéquats.

  • Information fiable = pouvoir
  • L’adage “l’information, c’est le pouvoir” s’applique particulièrement bien à la notion générale d’utilisation stratégique de l'information.
    En réalité, seules les informations fiables donnent le pouvoir, car pour agir, il faut prendre la décision de le faire ou plutôt la bonne décision. En efffet, l'incertitude freine l'action et donc paralyse l'entreprise qui se doit d'agir pour perdurer et avancer.
    Chaque décison, bonne ou mauvaise, a des implications plus ou moins importantes pour l'entreprise et son bon fonctionnement, et de mauvaises informations peuvent conduire à de néfastes prises de décision dont l'entreprise peut ne jamais se remettre.

    Il en va de même pour la maîtrise de son environnement, de son marché, de ses contraintes et limites. Mais pour ce faire, l'entreprise n'a d'autres alternatives que de s'appuyer sur son patrimoine informationnel qui doit être toujours en alerte.

    Face à un environnement économique, juridique, social, technologique et règlementaire en constante évolution, l’entreprise, pour rester performante, a besoin d’éléments permettant d’identifier les menaces et opportunités liées à cet environnement et d’en évaluer l’impact sur ses activités. C’est pourquoi, les décideurs sont en constante recherche d’informations qui leur permettent d’orienter les décisions à prendre. Il faut préciser que le processus de veille stratégique doit se faire de façon continue pour demeurer optimal. C’est ici que la valeur stratégique de l’information prend tout son sens. En effet, l’information permet d’anticiper, de contribuer à un choix efficace et d’agir de façon appropriée.

    Pour l’entreprise, savoir qu’un concurrent est en train d’élaborer un nouveau produit par exemple permet d’anticiper et de réagir face à cette nouvelle « menace ». Bien sûr, l'idéal serait pour l’entreprise de connaitre aussi les caractéristiques de ce nouveau produit, les cibles auxquelles il s’adresse, etc. plutôt que d’avoir seulement l’information « brute ». Plus l’information sera détaillée, plus sa valeur stratégique augmentera, et plus celui qui la détient aura de pouvoir : pouvoir de réaction, de réflexion, d’anticipation…

    De ce fait, sur un marché concurrentiel, moins l’information est connue, plus elle est précieuse et plus elle a de valeur. L’économiste américain George Akerlof a théorisé ce phénomène sous le nom d’asymétrie de l’information que l'on retiendra ici comme source de pouvoir.

  • Partage et échanges

Qu'ils s'aggissent de bookmarking, d'e-mails, de forums ou de réseaux sociaux, les outils performants sont de plus en plus nombreux sur Internet et leur usage est aisément accessible au plus grand nombre.
Ce qui explique l'engouemment d'une majorité d'internautes français qui passent quotidiennemen 3h57 en moyenne (au travail et à domicile) sur Internet pour surfer (la France compte 38 millions d'internautes en 2011 de tous les âges*), donc aussi pour partager et échanger. Ce qui représente un potentiel de cibles non négligeables parmi lesquelles de nombreux encore à informer et à séduire pour votre entreprise.

Aujourd'hui, les terminaux mobiles téléphones, tablettes et ordinateurs portables) permettent d'accéder à l'information de façon très rapide, voir de la suivre "en temps réel" à tout instant. La miniaturisation des technologies et ses évolutions techniques offrent des possibilités encore inconcevables avant l'arrivée du haut-débit et du wifi.

Cette libre-circulation simplifiée sur le réseau entre les terminaux fixes et mobiles a transformé la consommation de l'information qui est devenue quasi-instantanée tout le temps et de n'importe où.
Par exemple, durant son trajet du matin en train, le décideur peut vérifier son planning du jour ou encore lire l'actualité lors de sa pause repas à midi.

L'entreprise a l'obligation d'être activement présente sur les réseaux concernés, mais en plus, elle doit interagir rapidement avec ses prospects, clients et partenaires pour ne pas risquer de les voir partir ailleurs d'un simple clic de souris.

3. La pollution digitale envahit les réseaux

Pourtant, c'est le seul outil informatique universel qui garantit l'interopérabilité entre les systèmes d'information. Ce qui l'a imposé comme un standard et rendu indispensable pour l'entreprise.
Il concentre tous les ressentiments : stressant, chronophage, inadpaté, spammé...
En effet, les spams sont devenus un fléau tel que les internautes s'en détournent de plus en plus. Même que certains professionnels envisagent de s'en passer dans un avenir proche comme Atos Origin, par exemple, qui affichait son ambition en février 2011 de devenir une entreprise « zéro e-mail » d'ici trois ans. Selon Thierry Breton, PDG d'Atos Origin, "les managers passent de 5 à 20 heures par semaine à lire et écrire des e-mails".

Et comment ne pas s'indigner face à la prolifération de sites, blogs et profils sur les réseaux sociaux laissés à l'abandon par leurs auteurs au fil du temps. Ils envahissent littérallement l'espace pour une utilité non avérée puisqu'ils ne sont pas exploités. Et cela ne concerne pas seulement les particuliers, mais aussi les entreprises (73% des sites n’ont pas été mis à jour depuis plus d’un an).

D'autres infopollutions pullulent sur Internet : hoax, troll, flood, désinformation... et elles ne sont pas prêtes de disparaître. La plupart se retrouvent lors d'échanges et de partage d'information.
Un hoax est un canular qui est propagé spontanément par les internautes soit par e-mails soit par les réseaux sociaux.
Quant au flood et au troll, on les retrouve habituellement sur les forums ou les listes de diffsuion. Là où le flood inonde de messages inutiles pour noyer l'information, le troll s'apparente à un sujet qui fâche et énerve tout le monde. Le troll cherche surtout à semer la pagaille allant même jusqu'à agresser et insulter gratuitement les autres. Tous les deux sont nuisibles et rendent les forums qu'ils inondent inutilisables.

Enfin, une dernière malveillance spécifique à la toile: les virus et consorts (pishing ciblé, pièces jointes malintentionnées, liens et adresses piégés....). Ils se retrouvent partout aussi bien par e-mails que lors d'un surf ou d'une recherche spécifique et représente une véritable plaie pour l'ensemble des internautes (particuliers comme entreprises).

L'infoppollution nuit gravement à l'information pertinente à tel point qu'il devient capital pour l'entreprise de la maîtriser pour lui permettre de continuer à s'enrichir. D'où l'importance manifeste de la fiabilité des sources de l'information afin de réduire au maximum les risques sachant que le risque nul est impossible.


information internet

4. L'économie de l'information

L'économie de l'information place l'information au coeur de son système. Elle constitue une ressource vitale (pétrole gris); elle est devenue, grâce au réseau libre d'accès, nécessaire à la vie de l'entreprise : on parle de société de l'information et de marchés de l'information.
Or l'information prend une valeur et une signification par rapport au contexte et à l'instant: on parle d'information stratégique, à savoir la bonne information au bon moment pour le bon utilisateur.

  • Coûteuse à produire, facile à reproduire
  • La première caractéristique de l'information est qu'elle est coûteuse à produire (rédiger un texte, composer un schéma, réaliser un graphique, monter un film...), mais une fois que le premier exemplaire est créé, le coût des exemplaires suivants est négligeable.

    Cette règle s’applique pour les informations digitales que l’on peut reproduire à l’infini sans perte de qualité. Le secret du succès réside dans la possibilité de tirer, à un coût marginal, plusieurs centaines, puis plusieurs milliers du même produit. Sur Internet, l’envoi d’un article ou d’un ouvrage à un client supplémentaire représente pour une entreprise un coût proche de zéro.

    Pour s’en tirer, la première règle de l’économie de l’information est la suivante: même si l’information ne coûte rien à reproduire, cela n'implique pas qu’elle ne vaut rien (pour celui qui la reçoit).

    La vente d'une information n'est pas basée sur le coût de production de celle-ci, mais d’après sa valeur d'usage qui permet de qualifier sa valeur réelle. Ce n’est pas une idée nouvelle, mais elle est compliquée à mettre en œuvre.

  • Prix différent selon la catégorie ciblée

La valeur de l'information varie considérablement d’un client à l’autre. Le problème est encore compliqué par le fait que la valeur du produit fini varie avec son nombre d’utilisateurs : l'intérêt est de viser une diffusion le plus large possible, afin de bénéficier des effets positifs du grand nombre.

Il existe plusieurs méthodes pour faire payer un prix différent aux différents clients: en vendant plusieurs versions du même produit, ou en pratiquant des prix différents selon les catégories d’utilisateurs (abonnements de groupe, réduction pour les clients fidèles ou spécifiquement ciblés comme les professionnels).

Une autre stratégie consiste à distribuer le produit gratuitement à certains consommateurs. En effet, la production d’un exemplaire supplémentaire ne coûte pratiquement rien. La manière la plus économique de faire connaître son produit est donc d’en distribuer des échantillons gratuits ou de faire de la gratuité son modèle d'affaires.
A l'image de Google qui voit la gratuité comme un investissement. En effet, Google ne cherche pas à posséder les contenus qu'elle indexe dans son moteur de recherche. Google milite pour que les contenus accessibles sur internet soient gratuits car elle veut en organiser le plus possible. Et la vraie force de Google est le ciblage. La société a, en effet, fait la preuve qu'on peut faire du profit sans faire payer le client, il suffit que d'autres supportent ce coût.
Gmail, qui offre une très grande capacité de stockage, est gratuit depuis son lancement et affiche des publicités ciblées. La preuve qu'il n'est pas nécessaire de posséder l'actif pour gagner de l'argent.

L’information n’est pas la seule à pratiquer les prix différenciés : les compagnies aériennes sont passées maîtres dans ce genre de pratique.

L’économie de l’information est une économie où le même produit peut avoir plusieurs prix et qu'il est possible de vendre le même bien plusieurs fois.

La mise en place par les fournisseurs d’information (boursières ou juridiques par exemple) de ce qu'on pourrait qualifier de "redevances d’usage" augmente le coût d’accès à l’information: plus le nombre d’utilisateurs est grand, plus l’information coûte chère. L’information ici se distingue de la logique des biens marchands de masse, à savoir, plus le nombre d’acheteurs est grand, plus le prix baisse…
Ainsi, les lecteurs pressés ou motivés achètent la version la plus chère et les autres attendent que le prix baisse.

En France, les Echos, par exemple, est présent gratuitement sur le Web, mais l’accès à ses archives est payant. Rassemblés en archives complètes, avec un moteur de recherche et une consultation pratique, les anciens articles des Echos constituent un produit nouveau et différent, qui s’adresse à un public pas nécessairement identique au public habituel du journal.

Ainsi, pour assurer une diffusion maximale de l’information, il faut que les coûts de distribution soient le moins élevés possible, et il faut donc profiter au maximum de l’effet de réseau: ceux qui font fortune dans l’économie de l’information ne sont pas ceux qui écrivent ou publient les best sellers; ce sont ceux qui parviennent à imposer leur standard en matière de distribution.

Conclusion

La révolution numérique a instauré un autre management de l’information pour que l'entreprise reste opérationnelle.

La valeur essentielle de l'information est de réduire l'incertitude subie par le décideur. Elle ne se mesurera donc que lorsqu'elle aura été intégrée dans un processus de gestion de l'information.

L'entreprise a tout intérêt à être son propre filtre et à ne pas devenir esclave de l'information. Elle doit absolument vaincre la crainte de manquer quelque chose d'important si elle choisit de s'en éloigner un peu, même quelques heures. Les outils nécessaires pour se tenir informer correctement existent déjà, il suffit simplement de les utiliser à bon escient.

Car Internet continuera à évoluer et son information n'est décidément pas un produit comme les autres qu'il appartient à chaque entreprise d'exploiter au mieux pour continuer d'avancer.

Et, si vous avez une question ou besoin d'un conseil, n'hésitez pas à me contacter.


* chiffres des pratiques et des usages des internautes Français en ligne, présentés par France Info et WeDoData.

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